Écoeuré.e.s d’être oublié.e.s : la situation criante de l’Outaouais

Écoeuré.e.s d’être oublié.e.s : la situation criante de l’Outaouais

Sous le thème « Écoeuré.e.s d’être méprisé.e.s », plusieurs groupes du Québec unissent leurs voix pour dénoncer l’effritement des droits sociaux en réalisant une grève féministe sociale et des actions du 29 avril au 3 mai.

L’Assemblée des groupes de femmes d’interventions régionales (AGIR), avec son comité Mobilisation féministe Outaouais et internationale (MFOI), fait partie de ces groupes, c’est une table de concertation féministe qui défend collectivement les droits des femmes en Outaouais. Elle est composée de 34 organismes membres qui côtoient quotidiennement des participant.es touché.es par des enjeux sociaux et des besoins criants notamment :

  • La pauvreté et l’exclusion sociale ;
  • Les violences systémiques ;
  • L’accès difficile au logement et à un revenu viable ;
  • Le besoin à des services publics gratuits et accessibles ;
  • L’inaccessibilité aux services pour les personnes sans statut.

Si les crises du logement et des services publics frappent tout le Québec, les régions ne sont pas toutes égales face à ces crises. Nous souhaitons partager nos préoccupations quant à la situation des femmes et des personnes marginalisées de notre région.

Au-delà des portes et des chiffres

L’Outaouais n’a pas été épargné par la crise du logement, bien au contraire. Le taux d’inoccupation des logements locatifs dans la région de Gatineau était près de 1 % en 2023.[1] À ce jour, l’offre de logements n’est pas suffisante, sans compter qu’il reste très peu de logements abordables disponibles. La proximité avec Ottawa dans la région n’est pas considérée dans notre offre de logements (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2024).

N’oublions pas que les barrières au logement ne sont pas seulement économiques, elles sont aussi structurelles. Les préjugés à l’égard de certains groupes, comme les personnes queers, racisées, ou immigrantes, peuvent freiner leur accès au logement. Par exemple, il est difficile pour les personnes immigrantes d’accéder à des logements sans historique de crédits ou références. Ces barrières d’accès mettent à risque ces personnes de subir de la violence ou de la discrimination liées au logement.

 L’accès difficile au logement apporte d’autres lourdes conséquences. Faute de logement abordable, de nombreuses femmes en situation de violence conjugale se retrouvent obligées de rester auprès d’un partenaire violent. Les personnes queers et les femmes immigrantes en situation de violence conjugale sont elles aussi vulnérables, d’autant plus que l’accès à des services représente un défi pour elles. Quand les femmes et les personnes marginalisées se retrouvent en situation d’itinérance, elles sont nombreuses à vivre de la violence, alors qu’elles tentent de survivre. Personne ne devrait avoir à choisir entre la rue ou la violence.

De réseau à zéro

 En 2007, nous obtenions un statut particulier en matière de santé et services sociaux pour réduire le retard de notre région.[2] La semaine dernière, Dre Dionne, une médecin de la région, déplorait la qualité et l’accès des soins pour la population.[3] L’accès aux services et aux soins est d’autant plus crucial pour les personnes marginalisées, notamment pour les personnes trans et les personnes sans statut ou avec un statut temporaire. Notons que l’iniquité de l’accès aux soins est aussi territoriale, les MRC rurales sont plus pénalisées que les centres urbains.

S’il y a une chose que la grève des travailleur.euse.s du secteur public a démontrée cet automne, c’est que les femmes sont fatiguées de tenir le réseau public à bout de bras. Les métiers traditionnellement féminins ne sont toujours pas reconnus au même titre que leurs équivalents masculins. Alors que les femmes occupent des métiers où elles prennent soin des plus vulnérables et des plus précaires, elles risquent elles-mêmes à la précarité. Elles sont d’autant plus à risque, lorsqu’elles sont situées au carrefour des oppressions. Cette précarité se retrouve également chez les travailleur.euse.s du milieu communautaire, un milieu largement sous-financé, et pourtant essentiel à notre filet social.

AGIR ensemble

Pour faire face à la crise du logement, nous réclamons :

  • Des lois assurant un accès équitable au logement, et ce, sans discrimination.
  • Le travail en partenariat avec les organismes de logement social pour démystifier les stéréotypes et les préjugés associés aux logements sociaux et pour sensibiliser à leurs droits et lois.
  • Le renforcement des ressources et des services disponibles pour les personnes en situation d’itinérance ou de logement précaire.
  • Plus de logements subventionnés, abordables et salubres pour répondre aux besoins de l’ensemble de la population, notamment des femmes.
  • Une baisse ou un gel des coûts des loyers au privé.
  • Une bonification des programmes de type suppléments au loyer.

Pour faire face à la crise du secteur public, nous réclamons :

  • De meilleures conditions de travail pour les professions à dominance féminine (éducation, santé, services sociaux, communautaire).
  • Plus de places en centres de la petite enfance pour tous les enfants, peu importe le statut de leurs parents.
  • La reconnaissance du travail invisible des femmes (tâches domestiques, bénévolat, proche aidance, soins aux personnes, stages non rémunérés, soutien apporté au sein de l’entreprise familiale).[4]
  • Des ressources pour les femmes sans statut légal en situation de vulnérabilité.
  • Un accès aux soins pour les femmes sans statut.

***

Au-delà de nos revendications, nous proposons l’utilisation de l’outil d’analyse différenciée selon les sexes intersectionnelle (ADS+) pour assurer les retombées positives des décisions et des initiatives politiques. Cet outil permet de rendre les services accessibles aux personnes qui vivent différentes discriminations. Nous croyons que c’est en travaillant ensemble et en développant des actions qui tiennent compte de l’ensemble de la population que nous arriverons à régler ces crises.

Anne-Julie Belleau, membre du comité MFOI d’AGIR.

[1] À Hull, ce taux se situait à 0,1 % en 2023.

[2] En 2019, l’Assemblée nationale déposait une motion afin de reconnaître le retard « important » de la région à l’égard du financement public en santé, en éducation, en enseignement supérieur et en culture.

[3] Tiré d’un article publié par La Presse le lundi 22 avril 2024

[4] Tiré de la fiche d’information Le travail invisible (Aféas, 2022)

109, rue Wright, 201
Gatineau (Québec)  J8X 2G7

Téléphone : 819 770-0351
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